Cosmogonie et spiritualité Kongo : de la naissance à la chute d’un Royaume

Fondé à la fin du XIVème siècle, le royaume Kongo ou selon ses autochtones, Kongo Dia Ntotila (signifiant dans la langue du royaume, le Kikongo « appartenant au roi ») est un ancien pays prospère d’Afrique Centrale. Le territoire du royaume recouvre le nord de l’actuel Angola, le sud de la république du Congo, et le sud-ouest de la République démocratique du Congo.....

Une organisation politique indissociable de la religion

La coexistence assumée d’un pouvoir royal et d’un pouvoir spirituel

La spiritualité et la politique royale en effet sont intrinsèquement liées en ce que la première est une influence pour la seconde. 

Après l’effondrement de Kongo Dia Tuku, les Kongo se dispersent et fondent d’autres royaumes: Kakongo, Kongo dia Buende ou encore l’État de Vungu. C’est de ce dernier que vient Lukeni, qui établit son royaume à Mbanza Kongo dia Ntotila.

On raconte qu’il est le fils cadet de Nimi a Nzinga, homme de pouvoir et Lukeni Iwa Nsanza dont il tient son prénom. Il souhaite établir sa propre fortune, avec ses compagnons: en récoltant des taxes sur le passage du fleuve Nzida, il rencontre sa tante. Celle-ci refuse de payer, s’en suit une altercation dans laquelle elle trouve la mort. Il s’enfuit et trouve refuge dans les terres de Mpangala qui deviendront ensuite Mbanza Kongo dia Ntotila. 

Néanmoins, à son arrivée, le territoire est déjà occupé par les Ambundu qui sont sous l’autorité de plusieurs chefs, dont un chef spirituel, Nsaku Ne Vunda. Les sources divergent sur l’identité précise de cette civilisation pré-bantu (les Ambundu): certaines estiment qu’il s’agirait de pygmées ou encore des peuples San, d’autres suggèrent qu’il s’agirait simplement d’êtres humanoïdes légendaires. Nous considérons ici pour être fidèle à la tradition, qu’il s’agit d’un peuple quelconque nonobstant les attributs particuliers que l’on peut lui prêter.

Lukeni souhaite prendre contrôle du pays. Après avoir soumis les premiers occupants du royaume, il achève sa conquête de la région du Mpangala. Néanmoins, il se heurte aux limites du sacré. Dans une économie basée essentiellement sur le travail agricole, le pionnier de la civilisation Kongo est perçu comme un étranger qui s’est établi sur une terre qui n’est pas la sienne. Il n’a donc pas la faveur des ancêtres qui sont entre autres responsables de la moisson, de la fertilité des sols et de l’abondance du gibier. C’est alors que Nsaku ne Vunda, le chef spirituel des Ambundu, qui joue le rôle d’intermédiaire entre le monde des vivants et celui des ancêtres instaure une alliance : chaque dirigeant souhaitant être reconnu légitimement comme Roi devra obligatoirement prendre pour épouse, une fille du clan Nsaku. Un adage Kongo dirait que « Pour tout Roi qui doit régner Nsaku ne Vunda doit être présent. S’il n’est pas là, son autorité ne peut être reconnue. ». 

Ainsi, Lukeni devient le Mwene Kongo. Mwene désigne celui qui pourvoit aux besoins du peuple. Il est également Ntinu, c’est à dire chef militaire et donc celui qui a à sa charge la défense nationale. À travers cette histoire, on voit donc que la spiritualité et la politique sont indissociables pour être Roi car elles sont au fondement même de la naissance du royaume. 

Le Mwene est élu par les principaux chefs de clan. Pour autant, cette élection a ses spécificités car il n’est pas permis à tous d’occuper cette fonction: celle-ci est premièrement censitaire mais elle est également sacerdotale c’est à dire propre aux prêtres. C’est dans ce contexte particulier qu’on peut alors parler de “royauté sacrée” ou encore de “royauté divine” car seuls peuvent devenir roi les prêtres ou autrement dit, les initiés à la spiritualité du clan Nsaku (devenu la spiritualité Kongo).

De plus, l’élection du Mwene est matrilinéaire: en effet, parce que Lukeni a dû s’allier au clan Nsaku par l’intermédiaire du mariage, symboliquement c’est la lignée féminine qui crée l’appartenance à la royauté et fonde donc l’accès au pouvoir.

Cela permet de mieux comprendre que les fonctions de Reine-Mère ou d’Épouse-Royale ne sont pas simplement honorifiques, à l’instar de nombreuses sociétés. Bien que les Mwene soient des hommes, ce pouvoir ne peut être acquis par tous. En réalité, ce qui va déterminer la possibilité de candidater pour le pouvoir est la naissance et donc la filiation à la mère. Seul est héritier au trône le prince, et seul est considéré comme prince le fils qui naît de la Reine. Cette information est cruciale car on comprend ainsi qu’il ne peut exister d’enfants illégitimes du Roi ayant la possibilité de se présenter en tant que successeur.

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