Kongo Dia Ntotila ou la manifestation étatique d’une spiritualité particulière
La tradition orale dit : “du Kongo nous
venons”.
Pour autant, comment est né le royaume et de quelle façon a-t-il été conçu ? Lorsque les Kongo disent que “Du kongo nous venons”, il est important de préciser, qu’il ne s’agit pas là du Kongo que nous avons étudié jusqu’à lors. En réalité, nombreux ont été les royaumes portant le nom de “Kongo” dans l’histoire, et le premier de tous ces royaumes est le Kongo Dia Tuku, dirigé par un Roi que l’on appelle le Nekongo. Toutefois, il n’existe pas à ce jour de preuve attestant de son existence véritable. Il faut également préciser que NeKongo est la traduction littérale de “la personne kongo”. En ce sens, il est aisé de comprendre que le roi qui établit le premier royaume, est selon le mythe fondateur, l’ancêtre commun des kongos de Ntotila. C’est à la suite d’une grande migration, prenant sa source dans le premier royaume, que le roi, suivi des chefs de clans va quitter la capitale du royaume, Mbanza Kongo dia Ntete, pour s’établir à l’Ouest de celui-ci, dans la région de Mpemba. Les raisons de ces migrations divergent selon les sources orales: certaines mentionnent des querelles avec d’autres clans, et d’autres mentionnent une période de disette et de famine causée par la surpopulation. Cette grande migration réalisée sous forme de spirale, nous rappelle le kodia, coquillage typique de la région. Elle prendra notamment par la suite une symbolique particulière dans la cosmogonie kongo.
La sagesse politique, l’art du dialogue, le
respect de la hiérarchie se trouvent contenus dans le Kodia. En effet, on dit
du premier roi qu’il fit d’abord le tour de son pays, avant d’y entrer et de
s’établir sur le trône. L’idée de “contourner” est donc inhérente à la genèse
des Kongos, d’autant plus qu’elle va perdurer dans la construction de Kongo dia
Ntotila.
Les fondateurs du Ntotila ont conçu leur pays
comme un grand cercle ayant quatre secteurs et pourvu d’un noyau. Ces secteurs
dans le sens des aiguilles d’une montre sous les suivants: la façade maritime
(l’Atlantique à l’Ouest), Kongo Dya-Mpangala au sud, Kongo Dya Mulaza à l’est
et enfin Kongo Dya Mpanza au nord. Ces secteurs sont également considérés comme
des entités administratives. Le noyau quant à lui a un statut particulier en
tant que province-capitale où réside le roi. Appelé Mbanza Kongo c’est à dire
chef-lieu, on le dénomme également Zita-Dya-Nza, traduction littérale de “noeud
du monde”. Cette dernière information est intéressante en ce qu’on retrouve une
nouvelle fois mais de façon implicite, la symbolique autour du Kodia. C’est
dans un pays conçu comme un cercle, que dans le noyau, le roi gouverne. Toute
l’imagerie autour de l’action de “contourner” prend sens.
Cependant, la construction du royaume n’est pas la
seule chose qui trouve une explication dans les croyances de ce peuple. Ainsi,
les Kongo iront jusqu’à expliquer mythologiquement la création du fleuve Nzadi,
qui traverse leur pays (devenu aujourd’hui fleuve Congo). La légende raconte en
effet, que le fleuve était à l’origine qu’une simple rivière et qu’il s’est
élargi sous l’impulsion de Nzondo, créature fabuleuse et omnipotente au don
d’ubiquité: doté d’un seul oeil, d’une oreille, d’un bras, d’un sein et d’une
unique jambe, on dit qu’il marchait extrêmement vite et qu’il était capable de
faire le tour du monde en un instant. C’est à lui que les Kongos doivent
notamment le déluge, qui à la suite d’inondations, fera d’une simple rivière,
un gigantesque fleuve.
À travers ces différentes histoires, on comprend donc que le royaume Kongo trouve sa forme, son organisation territoriale dans ses croyances ancestrales, et que lorsque celles-ci n’influencent pas la création du royaume directement, elles tendent néanmoins à expliquer la survenance d’éléments naturels constituants dudit pays (à travers le fleuve Nzadi en outre).